Ce mot, qui sert à désigner le pays imaginaire où l'on vivrait sans travail et sans souci, dans l'abondance et la joie, se dit aussi des lieux qui réunissent tous les agréments de la vie.
Paris est pour le riche un pays de Cocagne.
Selon les uns(1), ce pays de Cocagne est la partie du Languedoc qui composait l'ancien duché de Lauraguais. C'est là que se fabriquaient des pains coniques formés avec la feuille écrasée du pastel, et désignés sous le nom de coques ou coquaignes de pastel. Los coquaignes qui servaient à la teinture ont été pendant longtemps une source de richesse pour le pays. De là est venu l'usage de comparer les pays riches et heureux au pays où se fabriquaient les coquaignes, au pays de coquaignes. — En répétant le mot, on a forcé l'idée, et pays de cocagne a fini par être synonyme de félicité parfaite.
Suivant d'autres, c'est-à-dire suivant M. Génin, ce bienheureux pays de Cocagne est, ou plutôt était l'Italie. Autrefois, au XVIème et au XVIIème siècle, il y avait à Naples une montagne figurant un Vésuve d'où jaillissait a profusion du macaroni, de la viande et des saucisses que les gens du peuple se disputaient. Cette réjouissance s'appelait une cocagne, en italien coccagna, du vieux français cocquaigne, qui signifie contestation, dispute.
Cette explication, si elle était la bonne, aurait le mérite de rappeler l'origine de notre mât de cocagne car, aujourd'hui que l'idée de lutte a disparu, et que le mot cocagne est devenu synonyme d'abondance et de plaisir, le nom de mât de cocagne est un peu ironique. Il y a bien là-haut, en effet, des richesses que l'on vous offre, mais il faut les aller chercher, et ce n'est jamais sans beaucoup de peine qu'on arrive à ce résultat.
Le mot cocagne semble promettre des jouissances plus faciles; le mât savonné ne permet guère de citer le proverbe qui sert à caractériser l’abondance : « Il n’y a qu’à se baisser et en prendre. »